LE RESPECT DU DROIT D'AUTEUR - C&H 123
Posté le 19/11/2024
BONNE PRATIQUE - LE RESPECT DU DROIT D’AUTEUR
Catherine Weidemann
Agrémenté de quelques exemples concrets tirés de notre pratique de cithariste, j’espère que ce mets peu digeste du droit produira la curiosité d’un plat exotique ayant un goût de reviens-y ! Peut-être même qu’il deviendra un lieu d’échanges féconds avec certains.
Dans cet article, un vaste sujet vous est présenté : le droit d’auteur avec sa conséquence sur le droit de reproduction. Tout un programme ! Le droit d’exécution, c’est à dire le droit de jouer une pièce en public, sera l’objet d’un autre article dans un prochain Journal de liaison.
Tout, sauf simple !
Respecter le droit d’auteur, ce n’est pas simple. Sans être informé, on peut très facilement tomber dans des pièges. Cependant, il faut savoir que le droit d’auteur est protégé et que sa violation est soumise à des amendes, voire à des poursuites judiciaires.
La législation n’est pas toujours facile à comprendre. Les différences entre les situations sont parfois complexes et subtiles. Même à l’intérieur de l’Europe, il y a aussi des spécificités propres à certains pays. En cas de doute, il faut faire appel aux organismes compétents. La réponse à votre question ne sera pas forcément rapide. Mais avec patience et persévérance, vous l’obtiendrez un jour. Pour cet article, les recherches ont été effectuées pour la France, siège de l’association. Les éventuelles particularités des autres pays ne sont donc pas prises en considération.
ATTAQUONS CETTE QUESTION
Chez les citharistes, il y a tout d’abord la joie de jouer et de partager la musique avec d’autres. Cette joie est essentielle. Cette recherche sur le respect du droit d’auteur ne vise surtout pas à inhiber les élans enthousiastes des citharistes, mais à montrer les contours du droit d’auteur pour être en mesure de le respecter en toute conscience.
Je ne suis pas juriste, mais musicienne. Si des citharistes ont d’autres informations à ce sujet, soit complémentaires, soit contradictoires, je les remercie de rentrer en discussion pour avancer ensemble. Car nous avons tous besoin d’être mieux informés. Et pour cela, nous avons besoin au sein de notre association d’un groupe de personnes, ayant un intérêt ou une formation en droit, qui se penchent sur cette question complexe pour pouvoir rechercher et répondre aux questions des citharistes. C’est donc aussi un appel que je lance pour constituer un groupe thématique autour du droit d’auteur. Je vous espère nombreux et compétents !
1. DU CÔTÉ DE L’AUTEUR
1. 1 Le droit moral de « paternité »
Même si les femmes sentent généralement la création comme une maternité ou une gestation, la législation reconnaît à l’auteur -homme ou femme- un droit de paternité : son nom et ses qualités d’auteur doivent être mentionnées à chaque publication ainsi qu’à chaque représentation publique.
- Si vous êtes auteur ou auteure, n’oubliez pas de mettre votre nom sur votre composition. Cela permettra de l’identifier.
- Si vous être arrangeur ou arrangeuse, si vous avez fait une adaptation pour la cithare ou le psaltérion, n’oubliez pas de mettre le nom du compositeur de la mélodie et votre nom en tant qu’auteur ou auteure de l’arrangement ou de l’adaptation. Mais soyez attentif à l’impératif du droit au respect de l’œuvre quant à la mélodie.
1.2. Le droit au respect de l’œuvre
L’auteur a un droit au respect de l’œuvre : toute modification, suppression ou ajout susceptible d’altérer son œuvre sont soumis à son autorisation. Il a le droit de s’y opposer.
Vous devez demander une autorisation à l’auteur :
Si vous voulez utiliser son thème pour le développer dans votre composition.
- Si vous voulez arranger ou adapter sa mélodie pour la cithare.
- Si vous voulez ajouter d’autres voix à sa mélodie.
- Si vous voulez modifier les paroles d’une chanson que vous accompagnez.
- Si vous voulez supprimer une partie de l’œuvre et la jouer partiellement.
1.3. Le droit de divulgation
L’auteur a un droit de divulgation : il décide du moment et des conditions dans lesquelles son œuvre est mise à la disposition du public. C’est aussi valable pour une publication sur internet, quel que soit le site.
Vous devez demander une autorisation à l’auteur :
- Si vous avez fait un enregistrement d’une œuvre et que vous voulez le publier sur un CD ou sur votre site internet ou sur tout autre support.
- Si vous faites un montage visuel, que vous voulez y intégrer la musique d’un auteur que vous jouez, ou un extrait de son CD, et que vous voulez diffuser ce montage par e-mail ou sur internet ou sur CD ou en projection publique.
- Si vous avez digitalisé vous-même la partition d’un auteur et que vous voulez la diffuser à d’autres personnes.
- Si vous voulez traduire un texte écrit par un auteur.
1.4 Le droit de « retrait » ou de « repentir »
L’auteur a un droit de retrait ou de repentir : il peut retirer son œuvre ou la remanier. Avec une œuvre arrangée par un tiers, il peut demander un autre
arrangement.
2. DU CÔTÉ DE L’ŒUVRE
Ces quatre points du droit moral permettent à l’auteur de conserver la maîtrise de son œuvre en ce qui concerne sa représentation en public et sa reproduction. C’est un droit patrimonial qui touche l’exploitation de son œuvre.
Ainsi, pour exploiter son œuvre, l’auteur a un droit de représentation qui concerne toutes les manières de communiquer son œuvre au public, quel que soit le procédé, autant dans un lieu public (comme un concert) que par télédiffusion, autant par radio que par téléchargement sur internet. Ce thème fera l’objet d’un autre article.
L’auteur a aussi un droit de reproduction qui lui permet de décider la fixation matérielle de son œuvre.
Une protection pas éternelle.
Une œuvre est protégée dans le temps. Elle passe dans le «domaine public» 70 ans après la mort de l’auteur. Mais en France, il y a une réglementation spécifique avec une prorogation de cette durée suite aux années de guerre. Lorsqu’un auteur est mort pour la France, et selon l’année de création de l’œuvre, cette prorogation peut aller jusqu’à 45 années supplémentaires. Pour tous les auteurs français, il faut donc bien se renseigner (à la SACEM).
3. LIMITES DU DROIT DE REPRODUCTION POUR LE CITHARISTE-UTILISATEUR
En tant que cithariste qui utilise une œuvre après l’avoir achetée, vous avez un de droit de reproduction uniquement pour votre usage personnel, c’est à dire que vous pouvez la copier dans son intégralité pour votre usage personnel et dans le cadre de votre cercle de famille.
Toute autre situation n’est pas autorisée. Et tout particulièrement l'utilisation collective, c'est-à-dire hors du cercle de famille, de photocopies de musique imprimée (partitions musicales, paroles de chansons, méthodes...) qui n'est possible qu'avec l'autorisation de l'auteur ou de ses ayants droit (article L. 122-4 du CPI).
Plus précisément, dans le détail des situations.
3.1 La photocopie
- Vous achetez une partition ou une méthode. Vous en faites une copie pour pouvoir annoter des doigtés, ou pour écrire le détail de votre analyse, ou simplement pour la prendre en vacances. La copie reste pour votre usage personnel. Elle est autorisée.
- Dès le moment où vous en faites une photocopie pour votre ami-cithariste, pour son usage personnel, elle n’est plus autorisée. La pratique de la photocopie connaît au moins deux situations particulières, qui seront traitées dans le prochain numéro :
- Les monastères et les paroisses qui payent des redevances au SECLI. Disonsle déjà, ces redevances ne concernent PAS les auteurs de partitions pour cithare.
- Les écoles qui ont un droit spécifique de reproduction dans le cadre d’un enseignement.
3.2. Les partitions en PDF ou digitalisées
- Vous achetez une partition en PDF, ou vous l’avez reçue gratuitement de l’auteur, ou vous la recevez dans notre journal de liaison en tant qu’adhérent,
et vous l’imprimez pour votre usage personnel. C’est autorisé. - Vous scannez une partition que vous avez achetée pour la conserver ou pour la lire sur votre tablette. C’est autorisé.
- Dès le moment où vous envoyez cette partition en format digital à une autre personne pour qu’elle puisse aussi la jouer et l’imprimer pour son usage personnel, ce n’est plus autorisé.
3.3. La musique en audio
- Vous achetez un CD, que vous copiez sur votre ordinateur et que vous mettez ensuite sur votre mp3 ou votre téléphone. C’est autorisé.
- Dès le moment où vous envoyez un morceau de ce CD par e-mail à votre ami ou que vous le mettez sur son mp3 ou sur son portable, ce n’est plus autorisé.
4. JOUONS FAIR-PLAY ENTRE NOUS
Pour tous les citharistes et psaltéristes qui jouent des partitions pour leur plaisir, respecter le droit d’auteur, c’est d’abord une question morale, celle de jouer fairplay avec ceux qui écrivent de la musique pour cithare et psaltérion et avec ceux qui font des arrangements. Certains de ces auteurs vivent de la musique. Ce qui signifie qu’ils n’ont pas forcément d’autres sources de revenus que leurs publications (partitions, CD…), leur enseignement et leurs productions en public.
Respecter leur droit d’auteur, ce n’est pas uniquement respecter leur travail, c’est aussi leur permettre de vivre.