Cithares au monde - 2 C&H

Témoignage - Cithares en Afrique

Sr. Thérèse Marie - C&H 118


Je me suis intéressée à l’offre que les « Amis de la Cithare » nous propose pour tisser des relations et partager afin « d’élargir l’espace de nos tentes ».

Je m’appelle Sr Thérèse Marie, camerounaise et moniale carmélite déchaussée.

Notre monastère Notre-Dame des Apôtres est situé à Figuil dans le Nord-Cameroun, actuellement sous la cible des attaques de la secte terroriste « Boko Haram ». La vie que nous y menons est identique à celle de tous les autres Carmels thérésiens : prière, silence, travail, solitude, vie communautaire et fraternelle. Nous vivons du travail de nos mains, le plus rémunérateur est la boulangerie. 

Sainte Thérèse de Jésus, notre Mère disait à ses filles : « Le Seigneur est aussi au milieu des marmites », nous, ici à Figuil, nous ajoutons « du pétrin ! ». 

La boulangerie nous permet d’avoir un vrai travail, comme nos frères qui mangent à la sueur de leur front, de vivre du travail de nos mains. Ce travail tisse également nos liens sororaux 1), nous devons collaborer en équipe, plus même en sœurs. C’est même un travail de femme, puisqu’il ne demande pas beaucoup de forces physiques. La boulangerie nous permet de subvenir non seulement à nos propres besoins, mais également à ceux de nombreuses familles, car elle donne du travail aux revendeurs du pain. En plus, nous avons du bon pain frais pour notre consommation. Et pour nous, faire le pain, c’est aussi prier ! 

Nous avons aussi bien sûr d’autres activités comme les hosties, la vente de boissons médicinales aux multiples plantes et aux nombreuses propriétés, l’élevage de lapins, poules pondeuses, pigeons, cobayes, canards, chèvres de race, moutons et oies aussi ceux qui se débrouillent seuls dans notre parcelle comme hérissons, varans, perdrix, serpents et rats palmistes 2)... Nous réalisons des sachets de tisane de toutes sortes de plantes, des bougies, des objets en plâtre. Nous cultivons aussi de la spiruline. 

Parlons un peu à présent de ce qui nous unis: la cithare. Comment je l’ai connue ? Pendant mon postulat en 2005, en faisant le nettoyage de la bibliothèque du noviciat, j'ai découvert une étrange grande boîte poussiéreuse au-dessus d’une armoire. Lorsque je l'ai ouverte, drôle de chose avec de multiples cordes, c'était la première fois que je voyais une cithare, j'en ai été charmée. Je suis allée en vitesse trouver ma maîtresse, qui avait appris à jouer de la cithare avec Marcel Godard et Maguy Gerentet. Elle m'a expliqué ce que c'était et m'a donné quelques cours, mais avec les charges et les priorats 3), pas possible de m'apprendre plus.

J'accompagne la liturgie et joue quelques mélodies, c'est tout. Cependant, il y a un gros problème qui se pose ici, au Nord-Cameroun. La cithare ne supporte pas ce climat chaud et sec. Toutes les cithares que nous avons eues ont connu le même sort, la même maladie les conduisant à la mort. Elles commencent à se fendre de partout, mais ce qui est grave, souvent le bois qui soutient les cordes se soulève lui aussi, c’est un peu comme si la cithare est éventrée. Lorsque j’essaie de l’accorder, elle se désaccorde sous mes yeux, je vois la clef refaire le tour en sens inverse.

Voilà mon petit partage, j’achève en vous invitant tous à Figuil !!!! 


Notes de bas de page 

1) Rat palmiste : nom usuel d'un écureuil rayé vivant dans les rochers ensoleillés d'Afrique du Nord, en groupes nombreux gardés par des sentinelles aux cris perçants.

2) Sororal : Relatif à la sœur, aux sœurs

3) Priorat : charge de prieur ou de prieure ; durée de cette charge.