CHEMIN FAISANT : INVITATION A UN VOYAGE MUSICAL - C&H 133
Posté le 18/02/2025
Chemin faisant :
invitation à un voyage musical
Carole KOHLER - C&H 133
L’annulation des Journées de la Cithare a conduit le conseil d’administration à envisager de se faire l’écho, dans les prochains numéros de notre journal, de certaines communications prévues, en respectant la logique des « blocs thématiques » retenus pour le programme.
Nous débutons donc cette série avec la thématique prévue le samedi matin intitulée « RÉFLEXION : l’écriture et la codification des accords » dont la modératrice était Margarida Barbal.
Margarida est une musicienne professionnelle qui enseigne à l’ESMUC de Barcelone, école de renom où se forment les futurs musiciens non seulement en provenance de l’Espagne mais aussi d’autres pays. Elle joue du psaltérion depuis 2014. Nous lui avions demandé de modérer la table ronde en raison de ses connaissances de l’écriture de la musique depuis le Moyen-Âge jusqu’aujourd’hui.
Un itinéraire déjà balisé et suivi par bon nombre d’entre vous
7 articles ont été publiés à ce jour dans notre journal de liaison (entre le C&H n°
125 et le C&H n° 131). Pour mémoire, il s’agit de :
- Deux écritures pour une même musique…Commentaires
– Anne-Marie Dey-Chanelet ; Eliane Bouquin- C&H n° 125, juin 2018 - Réponses à diverses questions de notation
– Maguy Gérentet- C&H n° 125, juin 2018 - Présentation de la partition Veni Redemptor Gentium (article sur la numérotation des basses et contrebasses)
– Catherine Weidemann – C&H n° 126, septembre 2018 - Petite histoire des contrebasses du psaltérion 12/7
– Maguy Gérentet – C&H n°127, décembre 2018 - Le groupe « Partitions » :
- Anne-Marie Dey-Chanelet, Maguy Gérentet, Eliane Bouquin – C&H n°128, mars 2019 - Le débat relatif aux codes d’écriture pour cithares
– Propositions du CA- C&H n° 128, mars 2019 - Les points et bâtonnets dans l’écriture des partitions
– Groupe de Rédaction – C&H n°131, décembre 2019
Cette profusion montre en elle-même les enjeux importants de ces discussions qui nous concernent tous dans notre pratique de citharistes.
Le point de rencontre et nouveau lieu du départ : l’introduction d’Eliane Bouquin aux Journées de la cithare
Eliane Bouquin souligne pour sa communication prévue lors de ces JC,
Que pour nous « citharistes amateurs qui utilisons le matériel édité par les compositeurs, nous devons faire face à la multiplicité des écritures et des codages : confrontation à une lecture musicale complexifiée, et souci - voire problème- pour bon nombre de citharistes.
Récemment, les recherches et décisions de Catherine Weidemann ont ouvert un espace de questionnement autour de l’écriture et la codification des accords, notamment par la numérotation des cordes des accords avec contrebasses (ce qui concerne 3 accords sur les 12 possibles pour une cithare 12/7 que sont le C – D et C#).
Amateurs réunis autour des professionnels, débattre aujourd’hui sur ces questions est une nécessité… pour relier le passé au présent, construire l’avenir en parvenant, espérons-le, à un consensus. »
Échanger sur ces propositions d’innovations est un chemin de découverte, où chacun peut cheminer s’il le souhaite, et co-construire un avenir musical différent, optionnel, en ayant ouvert une porte jusque-là méconnue.
Je vous propose ci-dessous les points clés de ces différents articles parus depuis juin 2018 comme une immersion dans le monde des compositeurs et arrangeurs. Ce travail de relecture synthétique a pour but que le lecteur puisse retracer le cheminement de la réflexion et suivre le fil conducteur.
Comme le marcheur qui musarde et s’arrête pour écouter, observer, il est des haltes et étapes qui éclairent chaque jour différemment. Laissons-nous surprendre par des couleurs et saveurs particulières et découvrir l’historique des senteurs et chemins empruntés depuis 2018.
Première halte en juin 2018
Dans ce numéro de juin 2018, une partition de Maguy Gérentet est proposée avec deux écritures différentes, l’une avec et l’autre sans portée rythmique. MG écrivait alors :
« La portée rythmique demeure une nécessité lorsque s’accroît la complexité (voire même parfois impératif d’une portée de notes en clé de fa) ».
Elle ajoute plus loin concernant le signe du mordant :
« Mon handicap visuel allant croissant, il ne me permet plus de me familiariser avec un nouvel équipement ».
Eliane Bouquin et Anne Marie Dey-Chanelet expliquent ensuite dans leur article « Deux écritures pour une même musique »
« Les différences liées à « l’histoire » des choix du codage car toute écriture suit un processus d’évolution auxquelles se rajoutent les logiciels informatiques qui permettent l’avancée de la réflexion sans oublier les connaissances liées aux neurosciences c’est-à-dire la logique de notre cerveau ».
Deuxième halte : septembre 2018
En septembre 2018, c’était une partition d’un autre auteur, volonté affirmée du CA de promouvoir un auteur différent à chaque parution, à savoir Veni Redemptor Gentium, chant de l’Avent et de Noël de Catherine Weidemann, selon différentes présentations avec portée rythmique ou trois portées, avec la contrebasse notée 0 ou notée 1, des accords fragmentés. Chaque cithariste a pu expérimenter s’il le souhaitait une autre codification. Catherine Weidemann écrivait :
« Ensemble et/ou chacun pour soi, avec l’observation fine de notre corpsjouant, nous devons ouvrir un espace de dialogue bienveillant afin de tirer certaines décisions personnelles et/ou communes de codification. »
« Quelle que soit notre décision personnelle et en fonction des caractéristiques de notre instrument, il ne faut pas hésiter à offrir à nos yeux cette clarté d’écriture indispensable à la logique de notre cerveau pour que nos automatismes puissent se déployer sans entrave ».
Troisième halte : décembre 2018
En décembre 2018, Maguy nous proposait un article intitulé « Petite histoire des contrebasses du psaltérion 12/7 » c’est-à-dire que 3 accords comptent en fait 8 cordes » et cette innovation fit son apparition en 1988 (la même année que la
création de notre association). Côté utilisateurs, cette innovation fut appréciée, preuve que des changements notables sont susceptibles d’être intégrés sans grande difficulté par les musiciens fussent-ils amateurs.
Quatrième halte : mars 2019
En mars 2019, le groupe partition composé d’Anne Marie Dey-Chanelet, Maguy Gérentet et Eliane Bouquin dont l’objectif est de « Répertorier les multiples codes d’écriture des partitions, tenir compte du contexte historique et l’expliquer pour en élargir notre compréhension. »
Au-delà de certains codes, repris plus tard encore dans l’article de décembre 2019, il apparaît clairement l’émergence d’une problématique voire même d’une divergence (le mot malaise est même employé dans cet article) entre les différents compositeurs, arrangeurs.
Pour le randonneur en chemin depuis juin 2018 : un point d’étape s’impose en mars 2019 : finalement quelles sont les questions en suspens ?
Quels chemins possibles ?
Pour les 3 accords concernés, la question porte en fait sur 2 points :
· Lorsque la contrebasse est à jouer seule, comment la désigner par rapport à la basse ?
· Lorsque les accords « à contrebasse » sont plaqués, ou arpégés librement, comment désigner que l’on souhaite intégrer ou en exclure la contrebasse, subtilité à laquelle plusieurs compositeurs sont très attachés » ?
La position du CA en mars 2019 : la proposition d’un itinéraire avec un guide
Le CA a poursuivi la réflexion en réaffirmant ses choix dans le même numéro de mars 2019 :
- Un postulat clairement réaffirmé : la liberté fondamentale des éditeurs en s’appuyant sur la recommandation du Père Godard en 2001
« Un maximum d’indications musicales, et le reste, systématiquement expliqué en note de bas de page ou dans le recueil » - Des orientations fondamentales ouvertes sur l’avenir : Valoriser un patrimoine, diffuser la cithare.
- Le code d’écriture s’inscrit dans cette dynamique de valorisation, en aspirant à une certaine unité d’écriture afin que les amateurs n’aient pas à surmonter des obstacles de lecture dus à un manque de cohésion entre les codes.
- Une richesse : la diversité de nos cithares, richesse, mais aussi casse-tête !
- Une réalité déjà présente en la cohabitation des différents codes
- Une préoccupation partagée : ouvrons ensemble le débat.
- Nous mentionnions alors déjà une certaine tension entre Maguy Gérentet et Catherine Weidemann :
- Chacune propose des éléments d’explications qui ne sont pas obligatoirement contradictoires, mais souvent complémentaires.
- Une démarche de dialogue et de co-construction à engager et à renforcer : écouter et analyser l’avis de chacun, comprendre…
Nous avions alors évoqué la possibilité après la table ronde des Journées de la Cithare d’un vote consultatif, hypothèse à ce jour abandonnée, car il semble bien qu’un nombre certains d’entre vous soit un peu « dépassé » de leur propre aveu.
Cinquième halte : décembre 2019
Enfin, en décembre 2019, le travail dans l’écriture des partitions s’est poursuivi avec la clarification de certains codes que sont : les points et bâtonnets, codes qui existent encore dans des partitions anciennes. Ce code est maintenant avantageusement remplacé par la portée rythmique pour les partitions plus récentes et les auteurs pouvant intégrer les nouveautés des logiciels informatiques.
Et aujourd’hui, où sommes-nous ?
Les lignes polémiques de Maguy dans l'article qui débute page 39 de ce numéro ont nécessité de notre part un certain recul. Ensemble en CA, nous avons décidé de respecter l’intégralité des écrits de chacun. Car notre association est un lieu de rassemblement, d’échanges, et son journal de liaison en est l’écho.
L’ouverture de l’association est un gage de maturité, et le CA a démontré cet état d’esprit avec la publication de diagrammes, la promotion d’auteurs moins connus, le partage de vos expériences musicales, le travail de digitalisation engagé pour les œuvres dont les auteurs ont fait don à l’association.
Nous avons fait le choix d’essayer de ne laisser personne sur le côté du chemin… et d’avancer ensemble… mais ce choix nécessite une volonté commune de dialogue dans la bonne volonté. Nous en avons besoin aujourd’hui, et j’invite chacun à la cultiver.
Nous avons également souligné dans les pages de notre journal l’importance de respect de chaque éditeur. Et en connaissance des difficultés visuelles de Maguy, nous avons également cherché à trouver des solutions avec elle.
Car il est certain que Maguy ne peut s’approprier un nouveau logiciel, aussi l’association lui a proposé de l’aider à intégrer par exemple la portée rythmique en prenant à sa charge la saisie, ce qu’elle a refusé. La modification d’écriture, quelle qu’elle soit, a une incidence réelle sur son stock et devient alors une préoccupation personnelle tout à fait compréhensible, mais qui ne peut être confondue avec l’attente des citharistes à une écriture plus unifiée.
En CA, personne n’a jamais donné d’obligation ni de délai. Notre rôle est de proposer une ligne directrice. Avec la certitude qu’il n’est pas de difficultés qui ne puissent être surmontées, si nous décidons de les résoudre ensemble, notre main tendue est sincère.
In fine bien sûr, chaque éditeur décidera de suivre ce qui lui semble être juste pour lui, fondateur et au service de l’ensemble des citharistes.
Je sais pouvoir compter sur votre discernement à un moment où un projet construit est mis en œuvre. Le cadre et l’historique étant retracés, je laisse chacun à sa lecture et à son analyse, tout en vous invitant encore une fois à une volonté commune de dialogue dans la bienveillance. Restons dans la construction respectueuse et compréhensive, et regardons ensemble résolument vers l’avenir.